Orpheline de père et de mère, Thérèse (nom d’emprunt) traverse aujourd’hui des moments difficiles.
Ne disposant d’aucune information en matière de santé sexuelle et reproductive, elle est tombée enceinte à deux reprises avant d’être chassée de chez son oncle et par la suite de chez sa mamie. Aucun de ses partenaires sexuels ne reconnaît un enfant. La jeune mère de 23 ans vivote aujourd’hui seule avec ses deux fils.
Thérèse est une orpheline de 23 ans. Elle a perdu ses parents quand elle avait 8 ans. "Mes parents sont décédés dans un intervalle de 9 mois. Après le décès de mon papa, je suis allée vivre chez son grand frère. À mon arrivée, mon oncle a fait construire pour moi une maisonnette "entrer-coucher", c’est-à-dire composée d’une seule pièce.
Sa femme ne m’aimait pas du tout. Elle m’insultait tout le temps, que je suis une fainéante, une orpheline mal éduquée", se souvient-elle. Thérèse ne cesse de nettoyer ses yeux embués de larmes avec l’index et le pouce, de temps à autre. Dans cette atmosphère, avoir quotidiennement de quoi mettre dans le ventre devient de plus en plus difficile pour la jeune orpheline. Elle n’hésite, donc, pas à compter sur certains bienfaiteurs.
"Souvent, les gens qui me connaissaient me donnaient de l’argent. Je l’utilisais pour le savon, la pommade, et pour acheter à manger, quand je n’étais pas rassasiée à la maison. Les enfants de ma tante m’insultaient ; que je suis une mendiante", balbutie la demoiselle qui reste inconsolable.
Manque de conseils en plus de l’ignorance…
Thérèse est contrainte d’abandonner les bancs de l’école. Mais, d’autres problèmes viennent s’ajouter à son calvaire. Sa situation va de mal en pis. Surtout avec les aléas de… la puberté. "Je ne partais plus en classe. Parce que je n’avais personne pour payer ma scolarité. J’ai arrêté mes études en classe de troisième.
En ce moment, il y avait plein de garçons qui me faisaient la cour. Dans ma situation de précarité, il m’était difficile de résister aux avances de tous les garçons. C’était comme si je n’avais pas le choix. Et c’était difficile pour moi de distinguer le bon garçon du mauvais. En plus, je ne savais pas grand-chose sur la sexualité… Malheureusement, j’ai eu une surprise désagréable. Je suis tombée enceinte", marmonne-t-elle.
Avec cette première grossesse, les violences verbales et comportementales à l’égard de Thérèse dans la maison de son oncle se sont amplifiées. Néanmoins, Tonton a toléré qu’elle reste toujours dans la cour.
"Mais, deux ans après, je suis de nouveau tombée enceinte. Je ne dirais pas que c’est parce que je n’ai pas reçu de conseils. Mais, il y a aussi ça, en plus de mon ignorance. J’ai actuellement deux enfants. Leurs pères ne me veulent pas comme épouse. En réalité, je n’avais personne pour me donner des informations sur la sexualité. Sinon, j’aurais pu éviter le pire", déplore la jeune mère qui fond en larmes.
"Je n’ai jamais fait de dépistage du VIH
"À l’heure où je vous raconte cette histoire, je n’ai aucune idée sur mon statut sérologique. Je n’ai jamais fait de dépistage du VIH. Je souffre seule avec mes enfants. Puisqu’après ma deuxième grossesse que j’ai tenté d’avorter en vain ; mon oncle m’a finalement chassée de sa maison quelques mois quand j’ai accouché".
Les pères de ses enfants, à l’en croire, ne veulent pas entendre parler d’elle. Ces derniers ne demandent pas, non plus, les nouvelles de leurs progénitures. Thérèse se retrouve, ainsi, abandonnée par ses partenaires et rejetée par sa famille avunculaire. "Je pense que c’est quelqu’un qui m’a jeté un sort pour que je ne réussisse pas dans la vie. Ou bien, c’est pour gâcher mon avenir. En tout cas, je prie Dieu tout le temps", implore-t-elle, la tête baissée, le foulard trempé de larmes.
Après que son oncle l’a chassée de la cour, n’ayant pas de parent dans les environs, Thérèse fût obligée de changer de ville pour rejoindre sa mamie. "Je suis, donc, venue vivre ici chez ma grand-mère maternelle à Koudougou. Même étant là-bas, je n’étais pas à l’abri des injures. Et comme si le sort s’acharnait contre moi, un jour, un des enfants de ma mamie est décédé.
"Je demande à tous ceux qui prient de prier pour moi"
Les membres de sa famille se sont levés pour me chasser. Ils disaient que c’est parce que je dors chez ma grand-mère que l’enfant est décédé. Alors que le petit qui est décédé ne vivait pas dans la même localité que nous. J’ai été bannie de cette famille. Finalement, je ne sais plus où aller. J’ai été obligée de louer un logement "entrer-coucher" que je paye difficilement", souffle la jeune mère dans la tourmente.
Thérèse y vit désormais avec ses deux enfants. Le nécessaire vital se fait désirer. "Notre maison n’est pas loin de celle de grand-mère. C’est ainsi que souvent ma mamie prépare de la nourriture, et vient nous donner, à mes enfants et moi.
Toujours au Burkina, une grossesse non désirée peut conduire à une exclusion sociale
"Cela me passe souvent par la tête de mettre fin à mes jours. Mais, une voix intérieure m’en dissuade. Je ne sais plus à quel saint me vouer. Je demande à tous ceux qui prient de prier pour moi afin que toute cette souffrance prenne vite fin". C’est son vœu le plus cher.
À l’image de Thérèse, bon nombre de jeunes filles ont vécu ou vivent une histoire similaire. Et cela aussi bien dans la capitale que dans les milieux ruraux. Si seulement, ces filles qui sont devenues mères sans le désirer avaient eu de bonnes informations sur les questions de santé sexuelle et reproductive…
Ignorance des droits SSR et une sexualité précoce
La mesure de gratuité des méthodes contraceptives est effective au Burkina Faso. Elle est en phase pilote depuis le 24 juin 2019 dans deux régions, à savoir la région des Cascades et celle du Centre-ouest.
Mais, il faut noter que l’ignorance des jeunes en matière de planification familiale et de méthodes contraceptives demeure préoccupante. Le taux de prévalence contraceptive pour les méthodes modernes des jeunes femmes n’est que de 6,1% pour celles âgées de 15 à 19 ans et 19,2% pour celles âgées de 20 à 24 ans (Cf. PNA-PF 2017-2020).
Pour ce qui est des adolescents et des jeunes de façon globale, le taux de prévalence contraceptive est de 12,6% pour les 15 à 19 ans et de 21% pour les 20 à 24 ans. Pris sur la population générale, ce taux estimé à 22,5% reste toujours faible (EMDS 2015). Selon une étude de Guttmacher en 2019, 1/3 des grossesses étaient non désirées au "Pays des Hommes intègres".
Les jeunes filles se caractérisent encore par leur accès à une sexualité très précoce. Ce qui fait que les adolescents de 15 à 19 ans contribuent à 11% à la fécondité globale. Parmi les femmes de 25 à 49 ans, en 2018, 10% avaient déjà eu leur premier rapport sexuel avant l’âge de 15 ans", révèle Dr Ida Salou Kagoné, Secrétaire technique chargée de l’accélération de la transition démographique au ministère de la santé.
Une évidence, selon elle, qui fait que le taux de grossesses non désirées chez les jeunes et adolescents prend toujours de l’ampleur au Burkina. Et ces grossesses sont pour la plupart accompagnées d’avortements à risques, conclut-elle. Les acteurs sont unanimes qu’il faut poursuivre l’information et la sensibilisation des populations.
Source: Burkina 24
Commentaires
Il n'y a pas de commentaire pour cet article.